Le sport en général et le football en particulier dépassent très largement le seul cadre du terrain. Ainsi que l’attestent ces trois histoires où les notions d’éducation, de respect de la règle au bénéfice de tous et de l’apport des différences se révèlent inhérentes à la pratique même.
Lucas Alexandre : Au-delà des mots
« Dès les premières prises de balle, j’ai complètement oublié son handicap. Je n’avais plus affaire à un jeune souffrant de surdité, mais seulement à un bon gardien, avec d’authentiques qualités de footballeur. Le genre de garçons qui pouvait nous aider à atteindre nos objectifs parce que tout dans ses attitudes prouvait qu’il avait une âme de battant et que le groupe dans son ensemble allait en bénéficier. » Le « bon gardien » en question s’appelle Lucas Alexandre et les propos, évoquant leur première rencontre sont signés de son entraineur, Raymond Robbes. Sourd et muet de naissance, Lucas voue une passion absolue au ballon rond depuis sa prime enfance. Aujourd’hui âgé d’une vingtaine d’années, le « dernier rempart » a su repousser les obstacles de la vie pour s’imposer comme un élément incontournable de sa formation Itancourt-Neuville, évoluant au plus haut niveau régional. Une gageure pour un joueur de football jouant à un poste demandant de la connivence entre le gardien et ses défenseurs ? Son coach précise : « Ce que je retire de l’exemple de Lucas c’est bien que la communication dépasse très largement le cadre des mots formulés ou entendus. Ses partenaires s’adaptent à son handicap, non par compassion, mais simplement parce qu’il nous apporte une valeur ajoutée. En fait, Lucas est l’illustration même que la force de l’engagement se joue des différences. » Auquel cas, il ne s’agit pas seulement d’une illustration mais bel et bien d’un message. Et d’un exemple !
Rouen Sapins Football Club : l’éducation au sens large
Comment une association de football peut-elle contribuer au processus éducatif global d’un enfant ou d’un jeune ? « En ayant une action sur mais égalementen dehors des terrains lorsque les conditions l’exigent » répond sans ambages Samy Bouguer, le tout jeune président du Rouen Sapins FC. Une vision convaincante pour les décideurs de la 11ème édition des trophées Philippe Seguin qui ont récompensé les initiatives du club en leur attribuant le Grand Prix de l’ « Égalité des Chances ». Une reconnaissance nationale pour l’association multipliant les actions auprès des partenaires institutionnels et notamment de l’école. Un parti pris revendiqué par le dirigeant : « La première réussite, c’est celle de l’école. C’est un message que nous martelons sans discontinuer dans un quartier ou l’échec scolaire est encore trop présent. Or, le football s’avère un formidable moyen pour mener des actions concrètes auprès de nos licenciés en les aidant par exemple à faire leurs devoirs, en nouant des partenariats avec des collèges ou, au besoin, en recadrant les licenciés lorsque les attitudes ne sont plus en phase avec leurs objectifs d’évolution personnelle. » Un exemple supplémentaire attestant que le sport demeure une ressource incontournable pour véhiculer les valeurs citoyennes sans lesquelles aucune société organisée ne peut envisager perdurer.
Monsieur l’Arbitre est joueur
À 32 ans, l’ex-joueur professionnel Jacques Salze (3ème en partant de la gauche) s’est lancé dans une nouvelle carrière d’arbitre. L’ancien défenseur du Clermont Foot 63, trop tôt trahi par son corps, revisite sa passion du ballon rond de l’autre côté du sifflet. En charge de l’application de la règle cette fois-ci, Monsieur l’Arbitre confie : « En recouvrant la tunique, j’ai eu l’impression de redécouvrir mon sport. Il y a beaucoup de remises en question en fait, on a beau comprendre le jeu dans son corps, dans sa tête, un ancien bon joueur ne fait pas forcément un bon arbitre car l’expérience ne s’achète pas. » Pas plus que la motivation d’ailleurs. Cela tombe bien car l’homme en a à revendre : « À mon humble niveau, je souhaite participer à redorer l’image de l’arbitre qui ne comprend rien au foot. Mon exemple peut éventuellement contribuer à faire saisir aux joueurs que les arbitres sont aussi passionnés qu’eux et qu’ils font partie de l’essence même du jeu. Sans arbitre, pas de match, c’est aussi simple que ça !» Avant d’asséner une évidence trop souvent oubliée : « Lorsqu’on ne respecte pas les décisions de l’arbitre, quelles qu’en soient les raisons, c’est toujours le football dans son ensemble qui en pâtit ! » Une métaphore peut-être en ces temps de confinement imposé : la règle doit s’appliquer pour que la partie continue.
Rédaction par la revue Vestiaires